FUCHI NI TATSU -Harmonium

  • Réalisateur: Koji Fukada
  • Acteurs:: Tadanobu Asano, Mariko Tsutsui, Kanji Furutachi,...
  • Origine:Japon
  • Genres: Drame
  • Durée: 1h58
  • Année de production: 2016
  • Date de sortie: prochainement
  • Synopsis: Dans une discrète banlieue japonaise, Toshio et sa femme Akié mènent une vie en apparence paisible avec leur fille. Un matin, un ancien ami de Toshio se présente à son atelier, après une décennie en prison. A la surprise d'Akié, Toshio lui offre emploi et logis. Peu à peu, ce dernier s’immisce dans la vie familiale, apprend l'harmonium à la fillette, et se rapproche doucement d’Akié.

Le regard révélateur de Koji Fukada

Alain Lorfèvre

"Nous sommes un couple depuis l'accident de notre fille." Ce constat assainé par Akie à son époux Toshio résume la vision terrible de Koji Fukada sur les relations humaines. Il indique aussi spectateur que le sujet profond de Harmonium n'est pas son intrigue à proprement parler mais bien les mécanismes qu'elle permet de révéler.

Au début du cinquième film de ce Rohmer nippon, on découvre une petite fille a priori banal. Toshio tient une petite entreprise métallurgique familiale. Akie s'occupe de la comptabilité et de l'éducation de leur fillette unique. Tout au plus, on sent bien, effectivement, que dans ce couple, la passion et les signes extérieurs d'affection ne sont pas débordants. Akie est religieuse et transmet ses préceptes protestants à sa fille. Toshio semble l'on de tout ça.

Un matin, il trouve devant la porte de son atelier Takashi. On comprend qu'il est une vieille connaissance et qu'il vient de passer plusieurs années en prison. Il n'a plus ni famille, ni travail. Toshio, bien que manifestement mal à l'aise, s'empresse de le prendre comme assistant et de le loger.

Mise devant le fait accompli, Akie contient son mécontentement, en bonne épouse japonaise. La politesse de Takashi et son intérêt pour les leçons d'harmonium de Yasaka la font s'adoucir à son égard. Takashi finira par confesser son crime. Mais a-t-il tout dit ? Et que cherche-t-il réellement ?

Le cinéma de Koji Fukada, à l'instar de ses personnages, est tout sauf démonstratif. Son sens réside autant dans ce qui est dit et montré que dans ce qui ne l'est pas. Comme celle de l'harmonium de Yasaka, sa musique est à priori austère et singulière, un peu âpre. Mais elle a de la profondeur.

Son récit, tout en étant linéaire, et même parfois prévisible, emprunte des chemins de traverses, et recèle quelques coups de théâtres. Tous, encore une fois, sont là pour faire ressortir la solitude profonde des personnages, le poids des non-dits, qui tient autant à la culture sociale japonaise qu'au poids de la culpabilité. On pourra se laisser aller à scruter les échos, références ou réminiscences plus ou moins conscientes, d'œuvres sur d'auteurs européens, inévitables chez un réalisateur qui cite Rohmer et Balzac comme sources d'inspirations. Impossible, entre autres, de ne pas penser au Fils des Dardenne dans la deuxième partie. Riche de réflexion pour ceux qui oseront affronter sa rigueur formelle, Harmonium est l'œuvre d'un auteur qui, à l'instar d'un de ses protagonistes, utilise son art pour regarder le monde sous un angle révélateur.