La Commission Juncker

Europe

IntroductionCinq ans pour convaincre

C’est quoi l’Union européenne ? A quoi ça sert ? Qui fait quoi ? Pourquoi 28 commissaires ?...

Près de soixante ans après sa naissance, cette Union reste encore trop souvent incomprise, repoussoir de bien des gouvernements et partis politiques (“c’est la faute à Bruxelles”)... qui n’hésitent pourtant pas à se tourner vers elle quand quelque faillite financière ou diplomatique menace. Car, qu’on le veuille ou non, l’Union et la Commission influent sur presque toutes les composantes de notre quotidien.

L’Histoire retiendra que la “Commission Juncker” est entrée en fonction le 1er novembre 2014. On ne sait pas comment le nouveau président et ses 27 commissaires seront jugés dans cinq ans. Mais d’emblée, ce quatorzième exécutif européen depuis 1958 devrait marquer une rupture.

Son président, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, a promis de rendre le travail de son équipe plus démocratique. Il a aussi innové en nommant sept vice-présidents afin de mieux coordonner les dossiers mêlant les compétences de plusieurs commissaires. Enfin, répondant au marasme latent autour de l’idéal européen et au ressac de la crise socio-économique, Jean-Claude Juncker n’a pas hésité à qualifier lui-même “sa” Commission de celle de “la dernière chance”.

A l'heure d'aborder ce moment charnière, La Libre Belgique et lalibre.be vous proposent un Grand Format décryptant les rouages de cette mécanique communautaire. Qui sont donc ce président et ses vingt-sept commissaires ? Qu’ont-ils dit lors de leurs auditions devant Parlement européen ? Quels sont les défis qu’ils doivent relever ? Dans quel contexte ?... L’Europe, c’est aussi et avant tout votre affaire.

28 commissaires à suivre

Découvrez en détails les portraits des 28 commissaires

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JEAN-CLAUDE Juncker

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Jean-Claude Juncker

Pays Luxembourg

Date de naissance 9/12/1954

Groupe Politique Parti populaire européen (PPE)

Portefeuille

Président de la Commission européenne

Derniers postes occupés

Premier ministre du grand-duché de Luxembourg (du 20 janvier 1995 jusqu’au 4 décembre 2013), ancien président de l’Eurogroupe (le Conseil informel des ministres des Finances de la zone euro, du 1er janvier 2005 au 22 janvier 2013). Candidat du Parti populaire européen pour la présidence de la Commission lors des élections européennes de 2014.

A savoir

Le Luxembourgeois a effectué l’essentiel de ses études secondaires en Belgique, à Clairefontaine, avant de décrocher une maîtrise de droit à l’Université de Strasbourg. Assermenté comme avocat en 1980, il n’a jamais exercé. Car la grande histoire de sa vie, c’est la politique. Membre du Parti social-chrétien, il accumule les records de longévité : 32 ans de présence au gouvernement, où il est entré en 1982, à l’âge de 28 ans, comme secrétaire d’Etat au Travail et à la Sécurité sociale; 8 ans à la tête de l’Eurogroupe, et surtout, 19 années comme chef du gouvernement luxembourgeois. En 2009, ce polyglotte (français, allemand, anglais) bon vivant, fumeur invétéré et expert ès bons mots, est pressenti pour devenir le premier président permanent du Conseil européen, dont il est le doyen, mais se fait souffler le poste par le Belge Van Rompuy. De 2010 à 2013, il s’épuise en enchaînant les réunions lors de la crise de la zone euro; ses relations se tendent avec le couple franco-allemand composé par président Sarkozy et la chancelière Merkel. Sur la scène nationale, il essuie un revers quand son gouvernement chute, le 11 juillet 2013, suite un scandale impliquant les services de renseignements grand-ducaux. Malgré un bon score aux élections, il est victime d’un changement d’alliance, qui porte le libéral Xavier Bettel au pouvoir. Il rebondit en mars 2014 en étant adoubé Spitzkandidat du PPE pour le poste de président de la Commission. Le PPE ayant remporté les européennes, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union le proposent comme président de la Commission au Parlement européen, le 27 juin 2014, passant outre l’opposition des Premiers ministres britanniques et hongrois David Cameron et Viktor Orban - c’est la première fois qu’un candidat président de la Commission est nommé sans consensus. Le Parlement européen confirme ce choix le 15 juillet 2014 en l’élisant par 422 voix pour, 250 contre, 47 absententions et 10 bulletins nuls. Il innove en composant sa Commission, en désignant (outre la Haute représentante Mogherini) six vice-présidents chargés de la coordination des travaux de l’exécutif européen. Il surprend également en nommant certains commissaires “à contre-emploi”, eu égard à leur pays d’origine ou à leur profil. Le Parlement européen approuve sa Commission le 22 octobre par 23 voix pour, 209 contre et 47 abstentions.

mogherini

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Federica MOGHERINI

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Frederica MOGHERINI

Pays Italie

Date de naissance 16/6/1973

Groupe Politique Sociaux & Démocrates (S&D)

Portefeuille

Haute Représentante de l’Union pour la politique étrangère et de sécurité commune. Vice-présidente de la Commission

Derniers postes occupés

Ministre des Affaires étrangères du gouvernement de Matteo Renzi depuis le 22 février 2014. Elue pour la première fois en 2008 à la Chambre des députés. Responsable des questions de politique étrangère et de la politique européenne en 2013. A également été présidente de la délégation italienne pour l'assemblée parlementaire de l'Otan.

A savoir

Federica Mogherini baigne dans les relations internationales depuis vingt ans. Son esprit de synthèse devrait être un atout, dans une diplomatie européenne qu’elle connaît bien. Réputée trop proche de Vladimir Poutine, elle a manifesté une prise de distance depuis les débuts de ses auditions au Parlement européen. Mais sa présence à la plus haute fonction diplomatique de l’UE est avant tout le résultat d’une savante alchimie au Conseil européen et du plus vaste jeu de nominations pour les grands postes européens : elle avait pour elle d’être une: femme, issue d’un des grands Etats de l’Union, qui est aussi un des pays où les sociaux-démocrates ont remporté les élections européennes. Son défi ? Etre moins transparente que la très décriée Catherine Ashton. La situation au Moyen-Orient, la crise russo-ukrainienne et la politique de défense européenne seront ses deux dossiers prioritaires.

portrait

Frans Timmermans

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Frans Timmermans

Pays Pays-Bas

Date de naissance 6/5/1961

Groupe Politique Sociaux & Démocrates

Portefeuille

Premier vice-président de la Commission, en charge de la Meilleure réglementation et des Relations institutionnelles, Durabilité

Derniers postes occupés

Ancien diplomate

A savoir

Diplomate aguerri, polyglotte (il parle 7 langues, dont le russe, sans compter les dialectes du Limbourg néerlandais), Frans Timmermans fut collaborateur du commissaire européen Hans van den Broek au début des années 90, avant de devenir le conseiller de son mentor Max van der Stoel, Haut commissaire pour les minorités nationales à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. De 2007 à 2010, le travailliste Timmermans a occupé le poste de secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères du gouvernement du chrétien-démocrate Balkenende, avant d’être nommé grand manitou de la diplomatie néerlandaise par le libéral Rutte en 2012. Il sera à coup sûr l’homme fort de la nouvelle Commission puisque Jean-Claude Juncker l’a publiquement désigné comme son “bras droit”. Cet Européen convaincu, mais pragmatique disposera notamment du pouvoir de bloquer une initiative législative s’il estime que la Commission n’a pas à légiférer dans tel ou tel domaine.

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Kristalina GEORGIEVA

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Kristalina georgieva

Pays Bulgarie

Date de naissance 61 ans

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Vice-présidente en charge du Budget et des Ressources humaines.

Derniers postes occupés

Commissaire chargée de la Coopération internationale, l’Aide humanitaire et les Réponses aux crises. Directrice de la Banque mondiale pour la Russie à Moscou (2004-2007), puis vice-présidente de la Banque mondiale en 2008. A savoir : Populaire dans son pays, a toujours nié viser une fonction de premier plan en Bulgarie, par exemple celle de Première ministre, étant trop consciente du risque d’être entraînée dans la politique nationale, largement décriée. Par contre, elle a convoité le poste de Catherine Ashton comme Haute Représentante aux Affaires étrangères. Même si elle n’a jamais rempli de fonctions gouvernementales dans son pays d’origine, Mme Georgieva est considérée comme faisant partie des grandes figures politiques d’Europe oritentale. Son bilan en tant que commissaire sous la législature écoulée est salué.

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Andrus ANSIP

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Andrus ANSIP

Pays Estonie

Date de naissance 1/10/1956

Groupe Politique ADLE

Portefeuille

Vice-Président en charge Marché unique numérique

Derniers postes occupés

Ancien Premier ministre (2005-2014), ministre de l’Economie (2003-2005), maire de Tartu (1998-2004). Chef du Parti de la réforme de 2005 à 2014.

A savoir

L’Estonie est pionnière en matière de nouvelles technologies, ce qui est un atout incontestable pour le nouveau commissaire au Marché numérique unique, portefeuille stratégique pour Jean-Claude Juncker. Réputé “souple idéologiquement”, jonglant avec les chiffres, il est aussi connu pour être autoritaire dans l’exercice du pouvoir. Ancien membre du Parti communiste estonien, du temps de l’U.R.S.S., puis converti au libéralisme, il parle couramment le russe, ce qui n’est pas négligeable.

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Maroš ŠEFČOVIČ

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Maroš ŠEFČOVIČ

Pays Slovaquie

Date de naissance 24/7/1966

Groupe Politique Sociaux & Démocrates

Portefeuille

Vice-président en charge de l’Union de l’Energie

Derniers postes occupés

Vice-président sortant de la Commission européenne, en charge des relations interinstitutionnelles et de l’administration. Il a remplacé son compatriote Ján Figeľ comme commissaire européen à l’Education, la Formation, la Culture et la Jeunesse en octobre 2009. Ancien représentant permanent de la Slovaquie auprès de l’Union européenne (2004-2009) et ancien ambassadeur en Israël.

A savoir

Son parcours lui donne une connaissance approfondie des arcanes européennes. Une expérience qui lui sera utile pour gérer le dossier énergétique délicat du fait de la crise actuelle entre l’Union et la Russie. Les objectifs énergie et climat sont d’ailleurs un des premiers dossiers chauds (sans mauvais jeu de mot) de la nouvelle Commission. A jadis tenu des propos constestables sur les Roms.

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Valdis DOMBROVSKIS

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Valdis DOMBROVSKIS

Pays Lettonie

Date de naissance 5/8/1971

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Vice-président en charge de l’Euro et du Dialogue social

Derniers postes occupés

Ancien Premier ministre (2009-2014), député européen (2004-2009), ministre des Finances (2002-2004).

A savoir

Son pays avait connu la plus forte chute du PIB de toute l’UE durant la crise financière (sur deux ans, moins 25% !) lorsque Valdis Dombrovskis, ancien ministre des Finances, a été appelé au poste de Premier ministre... à l’âge de 37 ans. Menant une politique d’austérité ferme, non dénuée de conséquences sociales, il a redressé la situation et permis à la Lettonie d’entrer dans la zone euro en janvier 2014. A la surprise générale, il a présenté sa démission le 27 novembre 2013, endossant la responsabilité politique d’un drame (l’effondrement du toit d’un supermarché qui a fait cinquante-quatre morts). Valdis Dombrovskis fut brièvement candidat aux primaires du PPE pour la succession de José Manuel Barroso.

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Jyrki KATAINEN

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Jyrki KATAINEN

Pays Finlande

Date de naissance 14/10/1971

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Vice-président en charge de l’Emploi, la Croissance, les Investissements, et la Compétitivité.

Derniers postes occupés

Commissaire aux Affaires économiques et monétaires (depuis juillet 2014), Premier ministre de Finlande (2011-2014), vice-Premier ministre et ministre des Finances (2007-2011); vice-président du PPE (2006-2012).

A savoir

A soutenu, en tant que Premier ministre, les politiques d’austérité en Europe. Ce qui, compte tenu de ses portefeuilles, n’est pas anodin. A 43 ans, il est considéré comme déjà doté d’une solide expérience. Il a démissionné de son poste de Premier ministre pour être en lice pour un poste de commissaire européen. Sera en charge de la définition et de la mise en place du plan d’investissements public-privé de 300 milliards d’euros destiné à relancer l’économie européenne - une des promesses phares du président Juncker.

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Günther OETTINGER

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Günther OETTINGER

Pays Allemagne

Date de naissance 15/10/1953

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Economie numérique et société. Vice-Président de la Commission européenne.

Derniers postes occupés

Commissaire à l’Energie de 2010 à 2014; Ministre-Président du Baden-Württemberg de 2005 à 2010.

A savoir

La Chancelière Merkel avait prié Oettinger de réclamer le portefeuille du Commerce. Mais Oettinger "ne voulait pas", indique-t-on. Il visait et a obtenu le portefeuille du Numérique que la plupart des observateurs jugent essentiel à la relance de l'économie européenne - même si le vrai “patron” sera le vice-président Ansip. Réputé travailleur, perspicace et expérimenté mais peu charismatique, il maîtrise mal l’anglais, joue parfois solo et est aussi gaffeur occasionnel. Dernièrement, il a proposé que les drapeaux des Etats membres les plus lourdement endettés soient mis en berne au siège européen de Bruxelles. Ses connaissances du monde de l’économie numérique posent question, comme en a témoigné sa sortie lors de son audition, lorsqu’il a déclaré que l’Union n’avait pas pour vocation de protéger les stars dont les photos dénudées se sont retrouvées sur le Net. A-t-il compris qu’elles avaient été piratées ?

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Johannes HAHN

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Johannes HAHN

Pays Autriche

Date de naissance 2/12/1957

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Politique européenne de voisinage (PEV) et négociations d'élargissement

Derniers postes occupés

Commissaire à la politique régionale dans la Commission Barroso II (2010-2014), ancien ministre de l'Education (2007-2010), dirigeant local à Vienne du Parti des conservateurs populaires ÖVP et membre du Conseil municipal de Vienne (2003-2006).

A savoir

Engagé en politique depuis 1980, homme affable, “Gio” Hahn est considéré comme une force tranquille. Selon les observateurs, il pourrait insuffler une nouvelle dynamique aux négocations diplomatiques de l’Union européenne.

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Cecilia MALMSTRÖM

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Cecilia MALMSTRÖM

Pays Suède

Date de naissance 15/5/1968

Groupe Politique ALDE

Portefeuille

Commerce

Derniers postes occupés

Commissaire européenne aux affaires intérieures (2010-2014), ancienne ministre des affaires européennes (2006-2010) et eurodéputée (1999-2006). A savoir : cultivée, travailleuse, ponctuelle, branchée (aux réseaux sociaux) et polyglotte (suédois, anglais, français, espagnol écrits et parlés, ainsi qu’allemand et italien parlés) : voilà un modèle d’Européenne convaincue et affirmée… Comme eurodéputée, elle a fait parler d’elle en lançant une pétition pour transférer le siège strasbourgeois du Parlement européen à Bruxelles. Toutefois son bilan aux affaires intérieurs, notamment en matière d’immigration, a déçu. Elle hérite (d’un autre libéral, le Belge Karel De Gucht) du portefeuille du Commerce, au moment où la Commission négocie au nom de l’Union un accord controversé de libre-échange avec les Etats-Unis, le TTIP.

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Neven MIMICA

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Neven MIMICA

Pays Croatie

Date de naissance 12/10/1953

Groupe Politique Sociaux & Démocrates

Portefeuille

Coopération internationale et développement

Derniers postes occupés

Commissaire à la politique des consommateurs (depuis juillet 2013); ancien vice-Premier ministre de Croatie en charge des Affaires intérieures, étrangères et européennes (2011-2013).

A savoir

Neven Mimica est le premier commissaire croate, suite à l’adhésion de son pays à l’Union en juillet 2013. En charge du nouveau portefeuille de la Politique des consommateurs, il y a, en peu de temps, fait oeuvre utile selon les observateurs. M.Mimica est considéré comme un politique expérimenté, soucieux de consulter les différents intervenants d’un dossier. Peu charismatique, il pourrait néanmoins éprouver des difficultés à s’imposer ou à imposer ses propositions.

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Miguel ARIAS CAÑETE

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Miguel ARIAS CAÑETE

Pays Espagne

Date de naissance 24/2/1950

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Action pour le climat et l’énergie

Derniers postes occupés

Ministre de l’Agriculture dans le gouvernement de Mariano Rajoy (2012) et dans le gouvernement Aznar (2000). Tête de liste du Partido Popular aux européennes de mai.

A savoir

Député européen pendant douze ans et membre des commissions de l'agriculture et de la pêche, il connaît la musique et l’a parfois jouée sur des airs jugés un peu trop espagnols. C’est un politique respecté qui prépare ses dossiers. Mais impulsif et indélicat, aussi : sa petite phrase sur la supériorité intellectuelle supposée des hommes sur les femmes a fait grand bruit. Moins cependant que ses liens avec l’industrie pétrolière, qui ont “pollué” son audition mouvementée devant le Parlement européen.

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Karmenu VELLA

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KARMENU VELLA

Pays Malte

Date de naissance 19/6/1950

Groupe Politique Sociaux & Démocrates

Portefeuille

Environnement, Affaires maritimes et Pêche

Derniers postes occupés

Entré au Parlement maltais en 1976, il a été réélu à neuf reprises. En 1981, il est nommé ministre des Travaux publics, en 1984 ministre de l'Industrie, puis ministre du Tourisme de 1996 à 1998 et de 2013 à 2014.

A savoir

Ministre du Tourisme, il a défendu un secteur qui représente un quart du produit intérieur brut (PIB) de Malte. Durant son mandat, il a promu une industrie du tourisme durable. Mais Karmenu Vella a fait l’objet d’une campagne dénonçant sa propension au clientélisme, sa proximité avec certaines entreprises privées, son absentéisme parlementaire et son inexpérience européenne. Outre l’Environnement, il prend en charge les Affaires maritimes et de la pêche, un double-portefeuille conséquent censé refléter la double logique de la croissance "bleue" et "verte". Un mélange des genres dénoncé par les défenseurs de l’Environnement.

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Vytenis ANDRIUKAITIS

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Vytenis ANDRIUKAITIS

Pays Lituanie

Date de naissance 9/8/1951

Groupe Politique Sociaux & Démocrates

Portefeuille

Santé et sécurité alimentaire

Derniers postes occupés

Ancien ministre de la Santé (2012-2014), député de 1990 à 2004 et de 2008 à 2014, candidat malheureux à la présidence de la République à deux reprises.

A savoir

Bien que doté de peu d’expérience dans des fonctions exécutives, M. Andriukaitis est un politique expérimenté, parlementaire très actif en Lituanie. Travailleur et combatif, il s’est familiarisé avec les institutions et les dossiers européens en présidant la commission parlementaire idoine et la délégation lituanienne à la Convention sur l’avenir de l’Europe (2002-2003), ainsi que durant les six mois de la présidence lituanienne du Conseil de l’UE en 2013.

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Marianne THYSSEN

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Pays Belgique

Date de naissance 24/7/1956

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Emploi, Affaires sociales, Compétences et Mobilité professionnelles

Derniers postes occupés

Député européenne depuis 1991. Présidente du CD&V (2008-2010). Membre de la commission parlementaire des affaires économiques et monétaires, puis de celle du marché intérieur / protection des consommateurs.

A savoir

Appréciée et complimentée par ses collègues eurodéputés, y compris en dehors de ses rangs, applaudie autant par les associations de consommateurs que par les lobbies du secteur privé, Marianne Thyssen est tout sauf un choix de rattrapage, en dépit des conditions de la soumission de sa candidature en dernière minute par les négociateurs fédéraux belges. Au contraire, elle est sans doute l’une des commissaires correspondant le mieux à sa fonction et au choix idéal qu’aurait formulé Jean-Claude Juncker. Autant d’appuis qui lui seront nécessaire face à l’important dossier qui l’attend : la réforme du marché du travail.

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Pierre MOSCOVICI

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Pierre MOSCOVICI

Pays France

Date de naissance 16/9/1957

Groupe Politique Sociaux & Démocrates

Portefeuille

Affaires économiques et financières, Fiscalité et Union douanière

Derniers postes occupés

Ancien ministre de l’Economie et des Finances (2012-2014), ancien ministre des Affaires européennes (1997-2002), député français (assemblée nationale), ancien député européen et vice-président du Parlement européen.

A savoir

Assuré, compétent, respecté, social-démocrate convaincu. On lui promettait une audition difficile, en tant que représentant d’un pays - dont il fut ministre de l’Economie - qui a tiré, et tire encore, sur la corde du pacte de stabilité. Mis sur le gril, il a passé son examen avec succès. Mais la confirmation de sa désignation est aussi le résultat d’un donnant-donnant : les députés du S&D ont passé l’éponge sur les casseroles de Miguel Arias Cañete, cédant au chantage de ceux du PPE, qui ont alors donné leur fiat à la nomination du Français.

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Dimitris AVRAMOPOULOS

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Dimitris AVRAMOPOULOS

Pays Grèce

Date de naissance 6/6/1953

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Migration, Affaires intérieures et Citoyenneté

Derniers postes occupés

Ministre de la Défense (2011 puis 2013-2014), du Tourisme (2004-2006), de la Santé (2007-2009) et des Affaires étrangères (2012-2013), il a été maire d’Athènes, sa ville natale, pendant huit ans (1995-2002).

A savoir

Figure importante du parti conservateur Nouvelle Démocratie en Grèce, M.Avramopoulos peut s’appuyer sur une expérience gouvernementale solide mais qui, hors un bref passage aux Affaires étrangères, demeure limitée au niveau international. Son portefeuille à l’Immigration est un défi pour un Grec, qui devra composer avec la politique très décriée de son pays en la matière. Il a hérité, en dernière minute de la compétence de la Citoyenneté, le Parlement européen ayant émis le (ferme) souhait qu’elle soit retirée au Hongrois Tibor Navracsics.

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Christos STYLIANIDES

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Christos STYLIANIDES

Pays Chypre

Date de naissance 26/6/1958

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Aide humanitaire et gestion des crises

Derniers postes occupés

Porte-parole du gouvernement 2013-2014, un poste de haut rang à Chypre, il a été élu député européen en mai 2014. Il n’a jamais occupé un poste ministériel. Il a été élu membre du Parlement chypriote en 2006 et réélu en 2011.

A savoir

Est considéré par le président chypriote Nicos Anastasiades comme « un proche collaborateur ». Décrit comme un véritable pro-européen. Christos Stylianides a participé activement à l’adhésion de Chypre à l’UE, qu’il a défendue dès les années 1990. Homme de compromis, mais sachant faire preuve de courage politique (il a démissionné de son poste de porte-parole du gouvernement Clerides en 1999, en signe de protestation contre une affaire de corruption), il devrait faire un bon commissaire à l’Aide humanitaire selon les observateurs.

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Phil HOGAN

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Phil HOGAN

Pays Irlande

Date de naissance 4/7/1960

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Agriculture et développement rural

Derniers postes occupés

Ministre de l’Environnement, de la Communauté et du Gouvernement local (2011-2014), président du parti parlementaire Fine Gael (1995-2001), membre du Parlement irlandais (1989-2014)

A savoir

Politicien roué et expérimenté fort d’un quart de siècle d’activité, Phil Hogan est un ténor du Fine Gael, le parti de centre-droit qui gouverne l’Irlande depuis 2011 en coalition avec le Parti travailliste de centre-gauche. Un peu rugueux sur la forme, il n’est pas exempt de controverses, notamment en matière d’égalité des sexes ou sur les minorités.

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Jonathan HILL

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Jonathan HILL

Pays Royaume-Uni

Date de naissance 24/7/1960

Groupe Politique AECR

Portefeuille

Stabilité financière, Services financiers, Union des marchés des capitaux

Derniers postes occupés

Ancien leader de la Chambre des Lords (2013-2014), sous-secrétaire d’Etat au ministère de l’éducation (2010-2013). Entre 1998 et 2010, cet ancien chef de cabinet du Premier ministre britannique John Major a travaillé comme lobbyiste politique et consultant en relations publiques, à la tête de son agence Quiller Consultants.

A savoir

Peu de personnes en dehors des cercles de Westminster connaissent réellement le Baron Hill of Oareford. De ce fait, il ne peut pas être haï par les forces anti-UE ou pro-UE - idéal pour un commissaire originaire du plus eurosceptique des pays de l’Union. Il n’empêche : que Jean-Claude Juncker ait confié le portefeuille des Services financiers à un Britannique a fait grincer des dents. Lord Hill a promis aux eurodéputés, la main sur le coeur, qu’il ne serait pas l’homme de la City de Londres. Son mandat ne sera pas de tout repos : il va devoir se familiariser avec des institutions et un secteur qu’il connaît peu (d’où la volonté des eurodéputés de le soumettre à une deuxième audition). De plus, il sera exposé en première ligne des deux côtés de la Manche lors de la probable renégociation de la relation entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Lord Hill l’a dit devant le Parlement européen : il ne croit pas au scénario du Brexit.

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Violeta BULC

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Violeta BULC

Pays Slovénie

Date de naissance 24/1/1964

Groupe Politique ALDE

Portefeuille

Transports

Derniers postes occupés

vice-Première ministre du gouvernement de coalition de centre gauche depuis mi-septembre, cette novice en politique a fait carrière comme entrepreneur.

A savoir

Cette inconnue des députés européens et des observateurs politiques hérite de deux dossiers cruciaux : celui du ciel unique européen, loin d'être bouclé, et le 4ème paquet ferroviaire. Le fait qu’elle a suivi une formation en chamanisme, qu’elle croie au pouvoir créatif de la nature, et accessoirement, qu’elle soit ceinture noire de taekwondo en fait une commissaire au profil atypique.

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Elżbieta BIEŃKOWSKA

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Elżbieta BIEŃKOWSKA

Pays Pologne

Date de naissance 4/2/1964

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Marché intérieur, Industrie, Entrepreneuriat, PME, Espace

Derniers postes occupés

Ministre du Développement régional (2007) puis Première ministre adjointe, en charge de l’Infrastructure et du Développement (2013).

A savoir

Une des commissaires qui arrive à Bruxelles avec la meilleure réputation qui soit. Compétente, parfaite anglophone, énergique, bonne communicante, cette femme de confiance du Premier ministre polonais Donald Tusk a acquis le respect dans son pays jusque sur les bancs de l’opposition. On ne sait pas si elle conservera au sommet de l’Europe son franc-parler sans langue de bois.

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Vĕra JOUROVÁ

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Vĕra JOUROVÁ

Pays République tchèque

Date de naissance 18/8/1964

Groupe Politique ALDE

Portefeuille

Justice, Politique des consommateurs, Egalités des genres.

Derniers postes occupés

Ancienne avocate et femme d’affaires. Députée au Parlement tchèque depuis octobre 2013, et ministre du Développement régional depuis janvier 2014.

A savoir

L’eurodéputé Pavel Telička qui avait négocié l'adhésion de la République tchèque à l'UE et a brièvement été commissaire entre mai et novembre 2004, avait d’abord été pressenti à sa place. Supposée mieux maîtriser la politique régionale et des financements de l'UE.

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Tibor NAVRACSICS

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Tibor NAVRACSICS

Pays Hongrie

Date de naissance 13/6/1966

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Culture, Education, Jeunesse et Sports

Derniers postes occupés

Homme de confiance du Premier ministre Viktor Orban, il a été ministre de l’Administration publique et de la Justice du deuxième gouvernement Orban (2010-2014), avant de brièvement devenir, en juin dernier, le ministre des Affaires étrangères et du commerce du gouvernement Orban III.

A savoir

Réputé compétent et consciencieux, ce membre du parti conservateur Fidesz au pouvoir, est considéré comme un modéré. Il est néanmoins très critiqué pour son rôle actif dans la mise en oeuvre d’une réforme judiciaire controversée, notamment en matière de liberté d’expression et de la presse, qui a valu à Budapest les vives critiques de la Commission européenne sortante et du Parlement européen. Il fera à coup sûr l’objet d’une surveillance rapprochée, tant depuis l’intérieur qu’à l’extérieur de l’équipe Juncker. La compétence Citoyenneté lui a été retirée, à la demande du Parlement européen. Jean-Claude Juncker lui a confié les Sports, en guise de consolation.

portrait

Corina CRETU

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Corina CREŢU

Pays Roumanie

Date de naissance 24/6/1967

Groupe Politique S&D

Portefeuille

Politique régionale

Derniers postes occupés

Eurodéputée (2007) et vice-présidente du Parlement européen (depuis 2014)

A savoir

Eurodéputée depuis sept ans et vice-présidente du Parlement européen, Mme Cretu dispose d’une crédibilité auprès de ses interlocuteurs européens, même si sa carrière, éminemment politique (elle fut proche collaboratrice du président roumain Ion Illiescu durant ses deux mandats, en 1990-1996 et 2000-2004) peut laisser des doutes sur sa capacité à prendre des responsabilités exécutives de dimensions internationales. Elle fut un temps très proche de l’ancien secrétaire d’Etat américain Colin Powell, ce qui a fait naître la rumeur qu’elle était une espionne (de charme) venue du froid. Ce que la Roumaine a toujours fermement démenti.

portrait

Margrethe VESTAGER

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Margrethe VESTAGER

Pays Danemark

Date de naissance 13/4/1968

Groupe Politique Alliance des Démocrates et Libéraux européens (Alde)

Portefeuille

Concurrence

Derniers postes occupés

Ancienne vice-Première ministre et ministre de l’Economie et de l’Intérieur (2011-2014), ancienne ministre de l’Education et des Eglises (1998-2001), ancienne députée (Folketing), chef de RV, les Radicaux de gauche (2007-2014).

A savoir

Surnommée au Danemark Margrethe III, en référence à l’actuelle reine du pays (Margrethe II) ou « la vraie Première ministre », Mme Vestager s’est imposée comme un élément incontournable du gouvernement danois actuel. Les qualités de cette négociatrice expérimentée devraient aussi se manifester à la Commission, de par sa maîtrise des matières économiques et financières et sa connaissance des rouages des institutions européennes. Elle a fait forte impression lors de son audition.

portrait

Carlos MOEDAS

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Carlos MOEDAS

Pays Portugal

Date de naissance 10/8/1970

Groupe Politique PPE

Portefeuille

Recherche, Programme-cadre Horizon 2020

Derniers postes occupés

Ancien de chez Goldman Sachs et Eurohypo Investment Bank, il a été le négociateur du Portugal auprès de la troïka européenne (Commission, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international). Secrétaire d’Etat adjoint du Premier ministre portugais.

A savoir

Technocrate, mais considéré comme compétent, doué et pragmatique, il va gérer les 80 millions d'euros du programme-cadre de recherche Horizon 2020. Mais sa faible expérience politique et son absence de légitimité électorale pourraient le pénaliser face à plusieurs de ses nouveaux collègues, anciens ministres et chefs de gouvernement.

5 défis à relever

Découvrez les 5 défis de la commission

L'Europe dans le monde

Une action extérieure plus cohérente

Le printemps arabe a surpris l'Union européenne qui n'a pas su comment répondre aux attentes des populations du sud de la Méditerranée. L'Europe a été tout aussi désarçonnée par la crise ukrainienne qui s'est muée en crise russo-ukrainienne, avec pour conséquence un vif refroidissement des relations avec Moscou. La politique européenne de voisinage a essuyé des échecs cuisants, ces dernières années. La Commission n'en est pas la seule responsable - pour l'essentiel, c'est le Conseil, et donc les Etats membres qui gardent la main, en matière de politique étrangère. Mais elle ne peut pas non plus être exonérée de ces échecs et devra s'interroger sur les objectifs et la stratégie de la politique de voisinage.

Un autre travers de la politique extérieure de la Commission aura été son relatif manque de cohérence. “Chaque direction générale (DG) de la Commission perçoit les enjeux de politique extérieure selon ses compétences”, constate Vivien Pertusot, responsable du bureau bruxellois de l'Institut français des relations internationales (Ifri). “On a assisté à l'émergence d'une politique extérieure de la DG Energie, en raison de l'importance croissante des dossiers liés à la sécurité énergétique et à la sécurité d'approvisionnement. Mais l'approche de la DG Energie est forcément différente de celle de la DG Elargissement”, observe Vivien Pertusot. Qui rappelle aussi qu'il est arrivé “que lors de leur visite dans un même pays, des commissaires délivrent des messages presque contradictoires”.

Federica Mogherini devra faire mieux qu'Ashton

Le président Juncker entend que l'action extérieure de la Commission soit plus intégrée et plus cohérente. Ce sera notamment la tâche, complexe, de la Haute représentante Federica Mogherini. Le président Juncker attend de la vice-présidente de la Commission, qu'elle guide et coordonne le travail des commissaires à la Politique de voisinage et à l'Elargissement; au Commerce; à la Coopération internationale et au Développement, à l'Aide humanitaire. Rien de moins. Mais aussi qu'elle discute de la dimension externe des politique climatiques, énergétiques et migratoires avec les commissaires concernés. Federica Mogherini présidera chaque mois le groupe “affaires extérieures de la Commission”, dont la composition variera selon les thématiques. Elle jouera également le rôle de courroie de transmission entre la Commission et le Conseil, dont elle présidera la formation “Affaires étrangères”, de même qu'avec le Service européen pour l'action extérieure, dont elle est la “patronne”. La Britannique Catherine Ashton, qui l'a précédée à ce poste, a connu certains succès, dans les négociations sur le nucléaire iranien, ou la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo. Elle ne laissera pas pour autant un souvenir impérissable. “Ce qui importe, c'est que la nouvelle Haute représentante ait une vision stratégique. Il ne faut pas qu'elle coure le monde, mais qu'elle concentre ses déplacements et son action là où c'est nécessaire”, juge Vivien Pertusot. C'est-à-dire, pour l'immédiat, dans le voisinage immédiat de l'Union.

Le développement et le commerce, deux compétences exclusives

La Commission continuera par ailleurs à jouer un rôle de premier plan dans le domaine de la coopération au développement, une de ses rares compétences exclusives. “Les fonds européens de développement, c'est un levier important parce que l'UE est le premier bailleur de fonds international et tout émane de la Commission. Elle peut donc lier ces fonds à une certaine direction de sa politique étrangère.” Disposant également de la compétence exclusive de la politique commerciale, elle aura la main sur un dossier de première importance, puisque c'est elle qui négocie l'accord de libre-échange avec les Etats-Unis, “ mais aussi parce qu'il y a une amorce de négociation avec la Chine”, pointe Vivien Pertusot. En revanche, un domaine de l'action extérieure de la Commission tournera au ralenti : “Il n'y aura pas d'élargissement de l'Union à de nouveaux Etats membres au cours des cinq prochaines années”, a assuré Jean-Claude Juncker.

L'immigration

Immigration : l'urgence humanitaire et l'ouverture

En confiant un portefeuille spécifiquement dédié à l'immigration au Grec Dimitris Avramopoulos, Jean-Claude Juncker tente sans nul doute un pari. Mais un pari calculé, juge Denis Duez, directeur de l'Institut d'études européennes de l'Université Saint-Louis à Bruxelles, rappelant que l'immigration reste très largement une compétence des Etats membres, qui définissent « le volume des entrées et les conditions d'accès à leur territoire ».

Un demi-pas en avant

La ligne directrice fixée par le nouveau patron de l'exécutif européen ne rompt pas véritablement avec l'approche essentiellement sécuritaire en la matière, développée par l'Union européenne depuis de nombreuses années. « La lettre de mission adressée par Jean-Claude Juncker à M.Avramopoulos met encore largement l'accent sur un certain nombre de politiques très connectées à des questions de sécurité, observe notre interlocuteur. L'intitulé même de ce portefeuille ­ « Migration et Affaires intérieures » ­ traduit bien cela, alors que l'on aurait pu envisager un portefeuille « Immigration, Asile et Mobilité » qui aurait permis de cadrer ces enjeux sous un autre angle.»

A court terme, insiste M. Duez, la priorité des priorités pour l'UE sera de répondre à la crise humanitaire qui se déroule en Méditerranée centrale, régulièrement endeuillée par les naufrages d'embarcations surchargées de migrants. « On sait que les flux des migrations ont tendance à se résorber vers le mois d'octobre parce que les conditions de traversée deviennent trop dangereuses. Mais ici, nous sommes face à une situation particulière puisque ces départs s'expliquent avant tout par la situation en Syrie, en Libye, en Erythrée ou en Somalie. Ces personnes sont menacées directement par des conflits et on peut donc craindre qu'elles soient prêtes à prendre la mer à tout prix». Il faut donc qu'un certain nombre d'Etats membres acceptent rapidement de mettre des moyens sur la table (argent, navires, hommes...) et assument le fait que toute personne récupérée en mer puisse déposer une demande d'asile. «Compte tenu de la situation dramatique en Méditerranée, je crois que les Européens n'ont absolument pas le choix, sauf à s'asseoir sur leurs propres principes.»

Changer le regard sur ce phénomène

Sur le moyen terme, la Commission « devrait essayer de jouer de sa position charnière dans le processus décisionnel européen pour favoriser une vision plus transversale des questions migratoires », estime encore le Pr Duez. «Certaines politiques européennes, en matière agricole ou commerciale par exemple, peuvent être à l'origine de mouvements migratoires, parce qu'elles contribuent à détériorer les conditions de vie dans ces pays ou à priver les populations de leurs moyens de subsistance ». Dans le même ordre d'idées, l'UE doit aussi repenser la façon dont sa diplomatie se positionne dans le processus de résolution des conflits en cours, ajoute-t-il.

Par ailleurs, la Commission devrait proposer une approche plus large de la migration, suggère notre interlocuteur, en envisageant celle-ci sous l'angle de la mobilité. « On a souvent tendance à considérer que les migrants ont un impact négatif sur les sociétés qui les accueillent, en termes économiques notamment. Or, un certain nombre d'études montrent que ce n'est pas le cas. Il faut donc insister sur la contribution de ces personnes à la vie économique des Etats membres. Et il faut mettre en place des canaux qui rendent possible ces déplacements sans rejeter ces gens dans la clandestinité. En abordant cette question comme un enjeu de sécurité intérieure, on se trouve aujourd'hui dans une situation où l'on a produit exactement ce que l'on voulait combattre. Le renforcement des contrôles aux frontières tend à générer de la migration irrégulière et donc des réseaux de trafiquants. Il en découle une économie souterraine entre autres du travail au noir qui a un impact négatif sur les finances publiques. »

La relance économique

La relance, c'est maintenant

L'économie européenne devrait, selon les prévisions, sortir de la récession en 2014, avec une croissance de 1,6% du produit intérieur brut (PIB) à l'échelle des Vingt-huit et de 1,2% à celle des dix-huit pays de la zone euro. Mais le redressement est fragile, d’autant plus que l'Allemagne, moteur économique de la zone euro, est au bord de la récession. Le taux de chômage est en légère baisse. Mais il s'élève quand même à 11,5% de la population active dans la zone euro. Et à plus de 23% pour les jeunes de moins de 25 ans, voire à plus de 50% . en Espagne et en Grèce. Aussi, dans cinq ans, c'est à l'aune de la situation économique de l'Europe et de l'état du marché de l'emploi que l'on jugera l'action de la Commission Juncker. Sept commissaires ont d'ailleurs hérité de compétences touchant directement à ces matières, dont la Belge Marianne Thyssen, en charge de l'Emploi et des Affaire sociales.

Plan d'investissement

“Ma première priorité sera de renforcer la compétitivité de l'Europe et de stimuler l'investissement pour créer des emplois”, a déclaré Jean-Claude Juncker. Sa Commission présentera, avant Noël, un plan d'investissements public-privé de 300 milliards d'euros, étalé sur trois ans - à charge du vice-président Jyrki Katainen d'en préciser les contours. “On ne sait pas bien d'où sort ce chiffre de 300 milliards”, tempère Xavier Vanden Bosch, spécialiste des affaires économiques et monétaire à l'Egmont Institute. “L'idée est de stimuler l'investissement dans de grands projets d'infrastructures via le privé (des consortiums), la partie la plus risquée de l'investissement étant garantie par la Banque européenne d'investissement (dont les Etats membres sont actionnaires). Ça peut provoquer un effet de relance avec une valeur ajoutée dans tout ce qui est réseaux numérique, de transport, d'énergie”, souligne Xavier Vanden Bosch. “Encore faut qu'il y ait preneur parmi les acteurs privés”. Car les moyens d'investissements publics ne sont pas légion. Le budget européen 2014-2020, plafonné à 960 milliards, est maigre. Quasi tous les Etats membres sont à la corde, au niveau budgétaire. Or, pour Jean-Claude Juncker, '“il n'est pas possible de construire une croissance durable sur une montagne de dette”. Le Luxembourgeois, cela dit, estime aussi que les politiques d'austérité ont atteint leurs limites. Aussi Xavier Vanden Bosch prévoit-il que la Commission, investie du double rôle de Big Brother et de Père Fouettard budgétaire, “va utiliser au maximum la flexibilité du pacte de stabilité (en vertu duquel les Etats de la zone euro doivent maintenir leur déficit public sous les 3% du PIB et ramener progressivement leur dette publique sous le seuil de 60% du PIB)”, pour éviter qu'une trop stricte application des règles budgétaires n'étouffe la croissance et la consommation interne.

La balle est aussi dans le camp des Etats membres

Un autre levier dont dispose la Commission pour relancer l'économie est l'approfondissement du marché intérieur, notamment dans le domaine de l'économie numérique, très fragmenté. Elle va aussi continuer d'encourager les Etats membres à mener des réformes structurelles, à travers ces recommandations spécifiques annuelles... que les capitales suivront, ou pas, car les politiques sociales, de pensions, d'emploi, etc. restent des compétences nationales. “Le problème est que ceux qui entreprennent des réformes structurelles douloureuses ne bénéficient pas de la solidarité des autres pays, puisqu'il n'y a pas de fiscalité fédérale”, observe Xavier Vanden Bosch. “Le débat sur l'approfondissement de l'intégration de la zone euro lancé par Van Rompuy et Barroso, est au point mort parce que les avis des Etats membres sont trop divergents”. Reste à espérer que l'Europe sera épargnée par une nouvelle crise financière (que la nouvelle Union bancaire est censée prévenir) et/ou une flambée des taux d'intérêt des emprunts publics (que la Banque centrale européenne devrait endiguer en sortant son “gros bazooka”, le rachat illimité de dette publique). “La zone euro reste fragile : la situation de pays comme l'Italie, la France, l'Espagne, la Grèce, le Portugal, est imprévisible”, rappelle Xavier Vanden Bosch. “On est dans le même bateau, et tout le monde va plus ou moins dans la même direction. Si un pays échoue, si le résultat attendu n'est pas là, la situation deviendra difficile à gérer”.

Le traité transatlantique de libre-échange

Le traité de libre-échange transatlantique, réelle opportunité ou fausse bonne idée ?

Lancées sous la Commission Barroso (à laquelle les Etats membres ont donné mandat) les négociations pour conclure un accord de libre-échange commercial (TTIP, de son acronyme anglais) entre l'Union européenne et les Etats-Unis seront poursuivies par la Commission Juncker. Attention, dossier miné. Une partie de la gauche et de nombreuses organisations de la société civile­ sont vent debout contre ce projet. En revanche, les milieux économiques fondent de grands espoirs dans la création de cette zone de libre-échange transatlantique.

Assurer la protection des standards et des normes européens

Le TTIP vise à éliminer les entraves au commerce des biens et des services. Entraves tarifaires et, surtout, non tarifaires. Ainsi, la convergence des normes réglementaires est "la grosse priorité", de la fédération patronale BusinessEurope. D'aucuns redoutent à cet égard que le TTIP minent les normes et standards sanitaires, phytosanitaires, environnementaux, etc. de l'UE. Ce qu'a démenti, dans toutes les langues, la précédente Commission, qui sera reprise en écho par la suivante. Pour Pierre Defraigne, directeur-exécutif de la Fondation Madariaga-Collège d'Europe, on peut même envisager que le TTIP tire les normes vers le haut. Encore faut-il savoir lesquelles seront privilégiées, souligne l'ancien directeur général adjoint de la DG Trade de la Commission. Car les philosophies divergent des deux côtés de l'Atlantique : les Européens étant attachés au principe de précaution, les Américains à celui de réparation des éventuels dommages causés. Pour Pierre Defraigne, “le vrai risque, c'est que les standards sociaux américains sont plus bas et plus inégalitaires que les nôtres. Cela pèsera sur nos salaires et je crois que ça va aboutir à des restructurations coûteuses”.

Nombreux sont ceux qui estiment que le TTIP servira surtout les intérêts des multinationales. A cette aune, l'une des dispositions les plus controversées du traité est la création d'un Mécanisme de résolution des différends entre investisseurs et Etats. Soit des tribunaux privés via lesquels les “investisseurs” peuvent contester une législation contraire à leurs intérêts. M.Juncker n'y est pas favorable, la nouvelle commissaire au Commerce, Cecilia Malmström, bien. A suivre.

Réels bénéfices ou miroir aux alouettes ?

La Commission Barroso a “vendu” que le TTIP ferait progresser le PIB de l’Union de 0,5 à 1 % par an à l’horizon 2020. Les exportations européennes vers les Etats-Unis devraient croître de 28 %. "De tels accords ont toujours un effet positif pour la croissance et l’emploi", rassure un diplomate d’un Etat membre. Pierre Defraigne est dubitatif : “Il faut s'attendre à une croissance faible, inégalement répartie, qui va accroître les divergences entre Etats membres”. Le diplomate estime, lui "que si c’est l’Allemagne qui retire le plus du TTIP, ses voisins en profiteront indirectement, en y augmentant leurs exportations de produits semi-finis, par exemple”.

Le TTIP, enfin, serait une sorte d'Otan économique qui ne dit pas son nom. “Si on fait une norme transatlantique, les Chinois qui ont un grand marché en expansion, qui progressent dans le domaine des technologie de pointe vont créer leurs normes qui s'imposeront dans leur espace. On aura un morcellement des marchés et une confrontation des blocs”, déplore Pierre Defraigne. Qui ajoute que le TTIP achèvera de fragiliser le multilatéralisme de l'OMC, dont l'Europe et les Etats-Unis sont pourtant les piliers.

Encore faut-il que les négociations aboutissent à l'horizon 2015. Car chaque partie a tracé ses lignes rouges. Et si l'accord est conclu, il devra passer les rampes, escarpées, du Congrès et du Parlement européen. Faut-il dès lors jeter le bébé avec l'eau du bain ? L'ancien chef de cabinet de Pascal Lamy (à l'époque où il était commissaire au Commerce) ne le pense pas. “Il faudrait être plus modeste. Après sept rounds de négociations, on devrait avoir identifié 3 à 4 points où un accord avec les Etats-Unis ferait sens”. Ensuite, insiste Pierre Defraigne, “il faut ouvrir un trialogue avec l'Amérique et la Chine”.

Une énergique politique énergétique

Bâtir une Europe de l'Energie ou, à tout le moins, jeter ses fondations. De tous les défis que s'est assignés Jean-Claude Juncker, celui-là n'est assurément pas le plus mince. En témoignent les maigres résultats engrangés il y a une petite semaine lors du sommet européen consacré au dossier du Climat et de l'Energie. Arc-bouté à leur souveraineté énergétique, qui n'est pourtant qu'un leurre, les Etats membres ont décidément bien du mal à concevoir cet enjeu sous l'angle communautaire.

« C'est un peu comme si l'Union européenne était au sommet d'une colline, commente l'ex-eurodéputée écologiste, Monica Frassoni. On doit choisir entre deux directions. Soit sortir de la dépendance aux carburants fossiles et mener une transition énergétique qui est également bonne pour l'économie. Soit freiner fortement une série d'efforts qui ont déjà été mis lancés et en revenir à une série de mythes. Et ce en se servant de l'excuse de la crise économique et de celle de la découverte de nouvelles ressources supposées miracles, comme le gaz de schiste américain ou l'illusion que l'on peut consommer du charbon de façon propre. Tout cela se passe à un moment charnière où l'on doit renouveler un certain nombre d'infrastructures qui ont 30 ou 40 ans et où la question de l'indépendance énergétique et l'élément géopolitique sont encore plus évidents. Sans oublier la question des changements climatiques. Nous devons aller de l'avant.»

Renforcer l'interdépendance entre Etats membres

Présidente de l'« Alliance européenne pour économiser l'énergie » - un consortium qui rassemble une série d'ONG et de grandes entreprises -, l'Italienne ne fait pas mystère de l'option qui a ses préférences. A ses yeux, les priorités de la nouvelle Commission et de ses partenaires européens doivent aller à la constitution d'un marché de l'énergie le plus unifié possible. « Le gaz de schiste de l'Union européenne, ce sont les économies d'énergie et les énergies renouvelables, pour la simple raison que nous sommes vraiment à la pointe de ces technologies. Ce serait complètement bizarre de ne pas utiliser ce potentiel et ce savoir-faire. Donc, si nous devons mettre en commun nos ressources, il me semble que c'est là-dessus qu'il faut miser. Or, jusqu'ici la discussion sur l'Union de l'énergie se limite surtout à vouloir mettre sur pied un système d'achat commun du gaz russe et du gaz en général. C'est uniquement une vision consistant à augmenter le poids de négociation, mais si on se limite à cela, on ratera une énorme occasion. » L'autre grosse urgence, souvent pointée du doigt par les services de la Commission, consiste à renforcer et développer les interconnexions entre les réseaux européens de distribution de gaz et d'électricité. «A l'heure actuelle, il y a des pays où l'on peut produire beaucoup plus d'énergie renouvelable, mais les réseaux ne permettent pas la distribuer dans les pays voisins, ce qui est un non-sens», souligne Mme Frassoni. A terme, enchaîne-t-elle, « l'objectif fondamental est de créer un système énergétique d'une telle interdépendance entre les Etats membres qu'il n'y aura vraiment personne qui détient la clef de l'autre. »De cette manière, les questions de souveraineté nationale sur la composition du bouquet énergétique des uns et des autres pourraient peu à peu s'estomper.

L'efficacité énergétique est un investissement et non un coût

Tout cela est bien joli, mais le coût de cette transition n'est-il pas prohibitif? C'est en tout cas l'avis de certains acteurs, alors même que l'industrie européenne, confrontée à une concurrence mondiale qui n'est pas soumise aux mêmes contraintes réglementaires, n'est pas au mieux de sa forme. Non, répond notre interlocutrice. « Comme disent les Américains: « There's no free lunch». Quoi que l'on fasse, cela a un coût. Aujourd'hui, l'UE dépense plus de 400 milliards d'euros par an pour ses importations d'énergie. L'an dernier, on a payé 140 milliards d'euros à la Russie. Cela ne me semble pas gratuit et ça n'a pas l'air d'aller en diminuant. C'est vraiment un mode de pensée très ancré alors que la Commission européenne elle-même a publié des études qui démontrent que ce sont surtout les taxes et le coûts des matières premières qui ont tiré les prix de l'énergie vers le haut. Il est faux d'imputer cela aux subsides aux renouvelables ou aux mesures d'efficacité énergétique».

Alors qu'environ 60 % des importations européennes sont destinées au secteur du bâtiment (habitat, bureaux...), il existe un vrai gisement d'économies que l'Europe serait idiote de ne pas exploiter, juge encore Monica Frassoni. « Mais il y a un élément psychologique très curieux. Les ministres de l'Energie et de l'Industrie – presque tous des hommes, soit dit en passant – ont les yeux qui brillent quand ils parlent de construire des nouveaux gazoducs, des nouvelles centrales, des gros trucs. Et dans ce cas, ils parlent d'investissements. Mais quand on doit mettre des panneaux solaires sur une habitation ou revoir l'isolation des bâtiments publics, c'est perçu comme un coût. Je pense que la clef de la discussion est là. On considère qu'investir des moyens dans l'efficacité énergétique est un luxe, mais que l'augmentation de l'offre en carburants fossiles est quelque chose qui justifie d'y injecter des sommes colossales. Il faut sortir de cette approche et considérer que l'efficacité énergétique est, en quelque, sorte un carburant.»

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