Immersion au CHU de Charleroi

Au coeur d’une lutte épuisante contre un virus "pas comme les autres"

Il est 9h10 ce 21 avril et aux urgences Covid du CHU de Charleroi, sur le site de l’hôpital Marie Curie à Lodelinsart, c’est calme. "Ce matin, nous avons reçu deux patients couchés (arrivés en ambulance, ndlr) et un debout", commente Sylvaine Vandenheede, infirmière en chef des urgences. "Ces dernières semaines, les arrivées ont diminué."

Le flux ne s’interrompt cependant pas. Et l’on sait qu’une deuxième vague peut encore arriver. Si le week-end a été tranquille, comme d’habitude, l’activité a remonté lundi. Dans l’hôpital dans son ensemble, le nombre de patients Covid ou suspects est d’ailleurs en hausse ces derniers jours. Sans doute la conséquence d’une part d’un relâchement du confinement lors du week-end de Pâques et d’autre part d’une "gériatrisation" des cas, avec l’arrivée de nombreuses personnes venues de maisons de repos et qui restent hospitalisées longtemps, explique Frédéric Dubois, responsable de la communication du CHU.

Mardi matin, on comptait 63 personnes hospitalisées, dont 11 en soins intensifs et 52 placées dans des unités spéciales Covid (32 cas confirmés et 20 suspects).

Urgences

Accueil et prise en charge des patients Covid-19

L’accueil des urgences pour les patients suspectés d’être infectés au Covid-19 a été installé au -2, là où arrivent habituellement les ambulances. Les urgences classiques, elles, sont situées au -1, à l’entrée piétons. Une dame relativement jeune arrive à cet instant aux urgences Covid. Elle porte un masque, qu’elle a reçu de la steward postée à l’entrée du tunnel qui mène aux urgences. Lorsqu’elle entre, on l’invite à se désinfecter les mains et à pénétrer dans une des quatre logettes réservées à l’examen des patients, fermées de façon étanche par une bâche en plastique transparent et placées derrière un voile qui assure une certaine intimité. À l’intérieur, elle prend, elle-même, sa température, sa tension et sa saturation. Elle devra ensuite placer son dos contre la paroi en plastique afin qu’un médecin l’ausculte, de l’extérieur de la logette.

"Allez madame, courage !"

La patiente effectue également elle-même le prélèvement nasal qui sera envoyé pour analyse au labo. Hôpital académique, partenaire de l’ULB, le CHU peut réaliser lui-même, en six heures, l’analyse des échantillons. Pour cela, un prélèvement de qualité est nécessaire. "Dans 80 % des cas, le patient parvient à le faire lui-même, explique le Dr Marc Vranckx, médecin chef des urgences. Sinon, nous devons entrer dans la logette avec une protection intégrale, car quand on prend un échantillon, cela irrite et provoque un risque d’éternuer." L’écouvillon utilisé, une sorte de coton-tige, doit en effet être introduit jusqu’à 6 ou 7 centimètres dans le nez.

Cette patiente le réalise elle-même, sous les encouragements d’une infirmière : "Allez madame, crie-t-elle. Encore, encore, encore, sinon on va devoir entrer. Et maintenant dans l’autre narine ! Tournez, tournez !". Après ces examens, la plupart des patients arrivés sur leurs deux pieds repartiront chez eux, où ils devront s’isoler de leurs proches et être suivis à distance par leur médecin traitant.

La leçon italienne

L’équipe des urgences semble gérer la situation dans la sérénité. "Après un démarrage brutal, la routine s’est installée, confirme le Dr Vranckx. Les équipes sont cohortées. C’est une leçon que nous avons apprise de nos collègues italiens. Pour éviter la transmission de la maladie au sein du personnel, nous avons constitué deux équipes distinctes qui ne se croisent pas. Cela a eu un effet manifeste : nous n’avons déploré que quelques malades, et encore, souvent parce qu’ils avaient été contaminés en vacances. L’absentéisme est d’ailleurs moins élevé qu’en temps normal."

Douze heures par jour pendant sept jours

Depuis la mi-mars, le travail dans les unités Covid est dès lors organisé en deux shifts, de 7h00 à 19h00 et de 19h00 à 7h00. Chaque équipe effectue le même horaire durant sept jours, de mercredi en mercredi. La semaine suivante, elle est au repos. "On est tous passés à ce rythme, reprend Sylvaine Vandenheede. Y compris les temps partiels. C’est difficile, surtout pour celles qui ont des enfants. Mais personne n’a rouspété. Il y a une belle solidarité." Pour aider les jeunes parents, la crèche est gratuite pour le personnel. Et un hôtel à côté de l’hôpital a offert des chambres pour les soignants qui ont peur de contaminer leurs proches en rentrant à la maison.

À cet instant, arrive une ambulance. Une dame âgée, masquée, est débarquée et placée sur un lit à roulettes, par une équipe de quatre ambulanciers et infirmiers, équipés d’une blouse, d’un masque FFP2 (réservés aux personnes qui entrent en contact direct avec les patients) et de gants. Pour elle, comme pour tous ceux qui ont nécessité une ambulance, pas de passage dans les logettes. Elle est amenée directement vers l’ascenseur, qui la conduira au -1.

C’est là que se trouve la zone d’hospitalisation des urgences, où le patient pourra passer un bilan plus complet (analyse de sang, radio, scanner thoracique, etc.). Au centre de la pièce, le desk des médecins et infirmiers. Et tout autour, 12 chambres, dont trois sont occupées en ce moment.

Zone d'hospitalisation des urgences

Les plus jeunes au front

Le Dr Michael Beauprez, 28 ans, assistant en médecine d’urgence, est l’un des médecins qui se relayent dans l’unité d’urgence Covid (5 en journée et 2 la nuit). Avec d’autres jeunes collègues, il s’est porté volontaire. "On sait qu’entre 25 et 35 ans, on risque moins d’avoir des complications si on est contaminé, témoigne-t-il. Nous sommes une grosse équipe d’assistants. Le 17 mars, nous nous sommes réunis pour nous organiser. Et depuis on travaille 12 heures par jour (ou par nuit) une semaine sur deux."

L’avantage de ce dispositif, c’est que les médecins seniors expérimentés sont disponibles pour traiter les AVC et autres infarctus aux urgences non Covid, se réjouit le Dr Vranckx.
L’inconvénient, selon le Dr Beauprez, c’est l’usure d’un tel rythme de travail : "En tant que médecins, nous ne sommes pas habitués à des semaines de 7 fois 12 heures. On part tôt, on rentre tard. Cela chamboule toute notre vie. Et le plus dur, c’est de se remettre des nuits. Mais cela reste supportable. Si jamais cela devait durer un an, je ne tiendrais cependant pas le même discours."

Le patient, moche ou pas moche ?

Sa collègue infirmière Anne-Françoise Goffaux, dite "Mamy", ne dira pas le contraire. Ce mardi, au septième jour de travail consécutif, elle a des poches sous les yeux. "Ce sont des semaines difficiles. Nous sommes sous tension permanente, parce que ce n’est pas 'secure'. Mais dans l’ensemble, cela se passe bien. Nous formons une bonne équipe. C’est notre famille !"

La suite du parcours du patient à l’hôpital dépendra des examens réalisés et surtout de l’examen clinique, explique le Dr Vranckx. "Le plus déterminant, c’est l’état général du patient : son état de vigilance, sa façon de respirer, toutes des choses impalpables. Le patient, il a l’air moche ou il n’a pas l’air moche." Certains patients pourront rentrer chez eux, mais "dans 90 % des cas, ils sont hospitalisés, parce que ce sont des personnes âgées", chiffre Anne-Françoise Goffaux.

La zone rouge

L’hospitalisation se fait au 2e étage du CHU, dans les unités E2 et F2, qui ont été vidées de leur patients habituels pour se transformer en zones Covid. Dans celles-ci, l’agitation règne. Si d’autres zones de l’hôpital sont totalement désertes, à l’instar du hall d’accueil du CHU, ici, c’est une véritable ruche. Dans le couloir central, infirmiers et infirmières, souvent jeunes, et techniciennes de surface s’affairent. Sur la porte de chaque chambre, une affichette "zone rouge" sur laquelle est dessiné un "+" (patient contaminé), un "-" (patient négatif) ou un "?" (en attente du résultat).

Au milieu de ce brouhaha, deux techniciennes de surface déambulent derrière leur chariot chargé de produits de nettoyage. Elles restent de bonne humeur malgré la lourdeur de leur travail de désinfection des chambres. "Durant les premiers jours, on avait peur, confie Béatrice Urvinati. Mais nous sommes bien protégées." Les deux nettoyeuses portent en effet une combinaison intégrale, des gants, une charlotte, etc. "Le problème avec cette tenue, c’est la chaleur, nuance Angela Imerese. On nettoie quatre ou cinq chambres puis on retire tout et on va prendre l’air. Et puis on recommence." Douze heures par jour pendant 7 jours d’affilée, comme les infirmières du service.

Tout le monde pleure

"Le F2, en temps normal, c’est le service de médecine interne, d’infectiologie et de diabétologie, contextualise Sébastien Ninite, directeur du département infirmier du CHU. Pourquoi avons-nous choisi cet endroit ? Parce qu’il y a des chambres à pression négative (qui empêche l’air contaminé de sortir, ndlr) et parce que les soignants sont habitués à travailler avec du matériel de protection."

Au F2, le rôle des infirmiers consiste essentiellement en de la surveillance des paramètres des patients, des soins d’hygiène et du soutien psychologique des patients qui peuvent rester plusieurs semaines et "qui ne voient que nous", témoigne Christine Roelandt, infirmière-chef de service. "Le plus lourd, dans notre travail, c’est la charge émotionnelle. Ces personnes sont confinées dans leur chambre sans pouvoir voir leurs proches. On organise des 'facetime' mais les tablettes ne remplacent pas la présence humaine. On est à côté du patient qui pleure. Sa famille, de l’autre côté, pleure également. Et du coup, l’infirmière pleure aussi."

Haie d’honneur

Christine Roelandt passe une bonne partie de son temps au téléphone avec la famille des patients. "Je reçois de 100 à 120 appels par jour. C’est beaucoup, mais je prends le temps de le leur donner des nouvelles. Et parfois, je les rappelle même, parce que la santé du patient s’est améliorée par exemple. On n’est pas habitués à cela. Une catastrophe, ça dure un jour, mais ici, ça dure des semaines. Les gens à l’extérieur qui ne respectent pas le confinement ne se rendent pas compte de ce qu’on a vu ici. Des jeunes entre 30 et 50 ans, qui ont été mal en point, qui ont dû aller aux soins intensifs, ça fait peur." Heureusement, il y a aussi de bonnes nouvelles, des patients qui repartent sur leurs deux pieds. "Ceux-là ont droit à une haie d’honneur", sourit Christine Roelandt.

Mais sur la durée, les troupes s’essoufflent. "Cette cinquième semaine de cohorte a été difficile, physiquement et psychologiquement. Alors, nous avons fait une réunion avec la direction du nursing et la direction médicale et heureusement, ils nous ont renfloués en personnel. À partir de mercredi, nous allons faire des journées de huit heures au lieu de douze."

Béa et Angela à la sortie d'une chambre Covid-19

Béa et Angela à la sortie d'une chambre Covid-19

Christine Roelandt, infirmière-chef de service

Christine Roelandt, infirmière-chef de service

Unité des soins intensifs (USI)

Transfert aux soins intensifs

Quand l’état de santé d’un patient du F2 se dégrade, surtout sa saturation en oxygène, la prise en charge peut évoluer. "Si le score alarme est dépassé, explique Christine Roelandt, on appelle le réanimateur qui décide s’il le prend aux soins intensifs."


Ce mardi matin, c’est le cas d’une dame âgée, qui est transférée vers l’USI3. "Les soins intensifs du CHU se composent de quatre unités de huit lits, explique le Dr Maxime Van Cutsem, chef de service associé des soins intensifs. Nous avons actuellement dix patients Covid, répartis dans deux unités. Nous avons brièvement dû en ouvrir une troisième, parce que nous avions 17 patients. Au cas où, nous avions prévu d’utiliser également une salle de réveil, mais cela n’a pas été nécessaire. Nous avons toujours conservé une capacité d’accueil. Grâce au confinement, Charleroi a été moins impactée que la région de Mons. Nous avons d’ailleurs accueilli des patients venus d’hôpitaux montois qui débordaient."

Sélection à l’entrée des soins intensifs

Depuis le début de la crise, les soins intensifs du CHU ont accueilli 36 patients. En date du 22 avril, 8 y étaient toujours hospitalisés (certains depuis trois semaines), 17 en étaient sortis et 11 y étaient décédés, pour un total de 35 décès dans l’hôpital dans son ensemble. Tous les patients en grosse difficulté respiratoire ne sont en effet pas envoyés aux soins intensifs, affirme le Dr Van Cutsem. "Les personnes qui ont un trop mauvais état général, qui sont grabataires ou victimes de démence, on ne les a pas mises sous respirateur. Il y avait déjà eu une sélection dans les homes, lorsqu’on jugeait qu’il ne fallait pas d’acharnement. Ici, il y a une deuxième sélection. Les gens que nous accueillons aux soins intensifs, nous avons un espoir de les sauver."

Au F2, les patients peuvent bénéficier d’une légère assistance respiratoire, grâce à un masque ou des lunettes à oxygène, voire un masque de plongée Décathlon. Ceux qui arrivent aux soins intensifs passent généralement sous respirateur. "On constate souvent une dégradation rapide, reprend le Dr Van Cutsem. En 24 heures, un patient qui recevait seulement 3 litres d’oxygène peut avoir besoin du respirateur. Ce n’est pas un virus comme les autres."

Production et stérilisation de matériel
de protection

En plus de l’assistance respiratoire, les patients se voient appliquer un traitement médicamenteux : chloroquine ("sans savoir si ça marche", concède le Dr Van Cutsem), paracétamol ou morphine, ainsi que sédatif et curare paralysant, indispensables à l’intubation.

À l’entrée de l’USI4, une armoire métallique sécurisée contient le matériel de protection nécessaire à tout qui veut y pénétrer : combinaison intégrale étanche, masque et bonnet. Pour les soins aux patients, il faudra y ajouter une visière et des gants, vu les risques de contamination lors de l’intubation du patient. Étant donné les pénuries de matériel de protection, le CHU a mis en place son propre atelier de production de blouses, de masques et de visières, tandis qu’au service stérilisation, on s’est lancé dans la décontamination des combinaisons et des masques FFP2.

Un patient de moins de 40 ans

Sur la porte d’entrée de l’USI4, un poisson en papier a été collé, on imagine le 1er avril. Il y est écrit "Courage pour votre journée, la team. Coeur. À ce soir." Du courage, il leur en faut, en effet. De l’autre côté de la porte, on débouche dans un petit couloir qui donne sur le bureau des soignants et sa dizaine d’écrans de contrôle et sur huit chambres, dont cinq sont occupées ce mardi. Le plus jeune patient, qui souffre d’une maladie sous-jacente, a moins de 40 ans. Le plus âgé a 78 ans.

Dans une des chambres, Vinciane Scaillet, kinésithérapeute, s’affaire autour d’un patient inconscient, couché sur le dos, légèrement redressé. C’est l’heure de l’une de ses deux séances de kiné quotidiennes, d’une demi-heure chacune. "Monsieur est sédaté. Je viens de faire sa kiné respiratoire. Et maintenant je fais de la kiné de mobilisation", explique-t-elle, tout en manipulant les mains, les bras et les chevilles de son patient. "On doit faire ce que Monsieur ne sait pas faire lui-même. On essaye de maintenir une mobilité articulaire pour qu’il ne s’enraidisse pas. Et quand il se réveillera, on lui demandera de participer aux exercices."

L’ECMO pour soulager les poumons

Dans la même chambre, un infirmier veille sur le patient. "Mon rôle est de surveiller ses fonctions vitales et de lui donner les soins prescrits par le médecin", confie Simon Henon. "Monsieur est présent depuis trois jours. Il vient d’un autre hôpital qui n’avait pas d’ECMO."


L’ECMO, pour oxygénation par membrane extracorporelle, est un dispositif destiné aux patients qui ne répondent plus ni au respirateur, ni à la stimulation ventrale (quand le patient est placé sur le ventre pour faciliter la respiration), explique le Dr Van Cutsem. "L’ECMO, c’est le dernier recours. Cet appareil aspire du sang non oxygéné au niveau du coeur, l’envoie dans un oxygénateur et renvoie le sang oxygéné au patient. Cela permet de mettre les poumons au repos car, à la longue, le respirateur les abîme."

"Six heures sans boire et sans aller aux toilettes. Certains collègues font des malaises"
Simon Henon - infirmier aux soins intensifs

En tant qu’infirmier aux soins intensifs, Simon Henon, 29 ans, est habitué aux équipements de protection tels que ceux qu’il porte. "En temps normal, on les met pour s’occuper d’un seul patient. Mais ici, c’est douze heures par jour, entrecoupées par une seule pause, après six heures de travail. Autrement dit, pendant six heures, on ne boit pas, on ne mange pas, on ne va pas aux toilettes. C’est comme ça depuis le 14 mars. On ne s’habitue pas. Au bout de notre semaine, on est explosés. Certains collègues plus âgés ont fait des malaises. D’autres, diabétiques, font de l’hypoglycémie parce qu’ils ne peuvent pas manger."

"Monsieur vient de décéder"

Quand un patient se rétablit et peut quitter l’USI, les soignants savent pourquoi ils ont fait tous ces efforts. Parfois cependant, malgré l’énergie déployée, l’issue est fatale. Dans la chambre à côté, "Monsieur vient de décéder", annonce un infirmier, qui procède sans attendre aux soins mortuaires, avant que le corps du défunt ne soit rapidement emmené à la morgue puis aux pompes funèbres.

"Ce patient est décédé d’une surinfection, précise le Dr Van Cutsem. C’est courant chez les malades ventilés, pas seulement Covid, parce qu’ils ne toussent plus, ne crachent plus. On essaye de faire de la kiné respiratoire pour compenser mais la toux est un puissant mécanisme de défense."

"Nous sommes tristes de les voir partir seuls"

Pour les soignants, c’est un des moments les plus difficiles à vivre. "Le problème, avec cette maladie, c’est l’accompagnement des malades. Ils ne reçoivent pas de visite. On donne des nouvelles à la famille par téléphone. Annoncer un décès, ce n’est jamais facile, mais le faire par téléphone, c’est encore plus dur. C’est compliqué d’être dans l’empathie. On vit une drôle de période."

Avec une dizaine de décès en un mois et demi, l’équipe des soins intensifs du CHU de Charleroi n’est cependant pas confrontée à la situation qu’ont connue certains hôpitaux italiens, qui priaient pour assister à des guérisons, afin de garder le moral. "Chez nous, nous avons eu des succès avant d’avoir les premiers morts. On ne fait pas la file à la morgue, conclut le Dr Van Cutsem. Mais nous sommes tristes de les voir partir seuls."

Laboratoire de microbiologie

Au labo, on traque le virus sous haute protection

Dans les sous-sols de l’hôpital Marie Curie, les équipes du laboratoire de biologie clinique procèdent à l’analyse des prélèvements recueillis chez les patients pour déterminer s’ils sont porteurs ou non du virus.

La partie la plus délicate de l’opération consiste en l’ouverture des tubes qui contiennent les échantillons. Elle est réalisée dans une pièce sécurisée à pression négative, sous une hotte, par un technicien en combinaison étanche, avec doubles gants et masque FFP2. La technique utilisée pour isoler le virus est celle développée par l’Université de Namur. En six heures, elle livrera ses résultats.

Une autre technique permet de faire l’analyse en seulement septante minutes, mais pour un seul prélèvement à la fois. Une technique qui est donc plus coûteuse, mais qui peut se révéler utile lorsqu’on a besoin d’un résultat très rapidement, par exemple pour déterminer si un patient doit être hospitalisé dans une unité Covid ou non Covid.

L’ensemble du personnel de l’intercommunale de santé publique du pays de Charleroi (ISPPC) est en train d’être dépisté. Ce mardi, lors de notre visite, près de 700 personnes avaient déjà été testées, sur un total de 6250.

Il est possible d'obtenir les résultats en 70 minutes afin de décider d'une hospitalisation en urgence

Il est possible d'obtenir les résultats en 70 minutes afin de décider d'une hospitalisation en urgence

Stérilisation

Au service stérilisation, on décontamine des combinaisons et des masques de protection

Comme tous les hôpitaux, le CHU de Charleroi a une grosse consommation de matériel de protection durant cette crise sanitaire. Par exemple, ce sont près de 800 masques FFP2 qui sont nécessaires chaque jour. Vu la pénurie sur le marché, le CHU a décidé de décontaminer une partie du matériel déjà utilisé, qui pourra ainsi être réutilisé.

Le service de stérilisation de l’hôpital s’est ainsi lancé dans la décontamination des combinaisons étanches que portent les équipes du Smur, des urgences et des soins intensifs. "Ces combinaisons sont plongées dans une grande citerne de 300 litres d’eau, mélangée à trois litres d’un liquide virucide mais non toxique, déniché à Jumet, à quelques kilomètres de là," explique Pascale Gilles, infirmière en chef en stérilisation.

Dans la cuve, les combinaisons sont remuées à l’aide d’un manche par un membre du personnel hautement protégé (combinaison, gants, visière, bottes…). Ils sont ensuite ressortis et plongés dans une autre cuve, remplie d’eau claire. Une fois rincées, elles sont placées sur des cintres pour un séchage qui durera 24 heures. Après quoi les combinaisons seront à nouveau bonnes pour le service.

Le service de stérilisation décontamine également les blouses confectionnées dans l’atelier du CHU, ainsi que les masques FFP2 utilisés par le personnel au contact direct des patients Covid. Ces masques, sur lesquels chaque soignant écrit son nom et son service, pourront être utilisés jusqu’à cinq fois.

L'atelier de confection

Couture solidaire au Mambourg

Sur le site de la polyclinique du Mambourg, située à côté du stade du Pays de Charleroi et qui accueille une partie des consultations du CHU, a pris place un atelier de confection de matériel de protection destiné aux soignants en charge des patients Covid.

Vu les manques existant sur le marché, l’intercommunale de santé publique du pays de Charleroi (ISPPC) a démarré cet atelier de production. On y a déjà réalisé 400 casques à visière, plus de 2000 blouses, ainsi que des masques.

Joanna Campanelli, secrétaire médicale en temps normal, a choisi de venir confectionner des blouses plutôt que de télétravailler ou de rester chez elle à ne rien faire. "Au moins, je me rends utile", dit-elle, sourire aux lèvres, tout en lançant un appel : "On manque de couturières !".

Dans cet atelier, se relaient des dizaines de personnes, souvent bénévoles, pleines de bonne volonté et issues de tous horizons : des infirmières durant leurs jours de repos, des couturières, un ingénieur civil, des techniciens, un garnisseur et même une sénatrice. La solidarité à la sauce carolo.

Merci aux équipes du CHU de Charleroi pour leur accueil et leur disponibilité, malgré des conditions de travail compliquées.